Braqueur.jpgRéalisé par Benjamin HEISENBERG. Course haletante, rejetant toute psychologie pesante, toute explication réductrice, ce polar est pur mouvement, à la fois glaçant et trépidant. Le film et le roman dont il est adapté s’inspirent d’un fait divers réel qui défraya la chronique à la fin des années 1980. Johann Rettenberger s’appelait Kastenberger, surnommé Pumpgun Ronnie parce qu’il utilisait un fusil à pompe et un masque de Ronald Reagan. Il fut abattu après des dizaines de braquages et après avoir déclenché la plus grande chasse à l’homme de l’histoire de l’Autriche.

Johann Rettenberger est un taiseux, un vrai. Il faut dire qu’au début du film, ce braqueur a pour univers un espace d’environ 9m2, généreusement mis à sa disposition par l’administration pénitentiaire. Pas d’amis dans l’univers carcéral, son seul compagnon semble être le tapis mécanique qui lui sert à s’entrainer à la course de fond, heure après heure, quand il n’est pas dans la cour de promenade pour courir encore. Son seul interlocuteur est l’agent de probation qui semble croire à ses chances de réinsertion par le sport. Mais c’est une relation à sens unique, Johann se désintéressant totalement des efforts du travailleur social pour construire une relation avec lui. Et dès qu’il sort de prison, la seule aspiration de Johann est de courir, toujours courir. Il participe au marathon de Vienne où, amateur, il est le premier Autrichien classé.

Mais il faut plus qu’un marathon, aux règles et au parcours trop définis, trop balisés, pour satisfaire sa soif insatiable de mouvement, sa recherche de la maitrise qu’il peut avoir sur l’espace, son aspiration à repousser les limites de sa liberté fraichement regagnée. Et le moyen qu’il connait le mieux pour aller plus loin, pour passer les bornes, ce sont les braquages. Il va donc s’y remettre, s’attaquer à de petites agences bancaires de quartier, peu sécurisées. Le visage caché derrière un masque cadavérique, il va les braquer à pied – courir, toujours courir – à un rythme effréné (jusqu’à trois dans la même journée), jouant au chat et à la souris avec la police, voulant toujours plus se prouver son invulnérabilité, l’aspect financier semblant secondaire puisqu’il se contente d’entasser les billets dans un sac en plastique sous son lit. Et rien ne doit entraver sa route, que ce soit l’agent de probation trop consciencieux, donc bientôt suspicieux, ou l’amour pour une jeune femme qui l’attire mais qu’il fuit, parce qu’il doit pouvoir continuer à courir. Sans attache, sans frein…

Des rues de Vienne encombrées de coureurs (séquence du marathon), de passants, de bagnoles qui sont autant d’obstacles dont il faut se méfier, jusqu’aux forêts impénétrables où se réfugie le fugitif aux talons ailés, Benjamin Heisenberg oppose avec brio l’impassibilité du héros (extraordinaire Andreas Lust), insaisissable au propre comme au figuré, et le mouvement perpétuel d’une fuite éperdue. Et c’est une vraie leçon de cinéma.

Autriche - 2009 - 1h41 - VOSTF - 2Go résolution HD 720p (1280X720) - ASC distribution - avec Andreas Lust, Franziska Weisz, Markus Schleinzer, Peter Villnal… Scénario de Wolfgang Widerhofer, d’après le roman L’Envolée belle de Martin Prinz.