Democratie-zero6.jpgFilm documentaire de Michel Toesca

On se souvient de ce bon mot de Winston Churchill qui disait à propos de la démocratie qu’elle « est bien le pire des régimes à l’exception de tous les autres déjà essayés dans le passé ». Il faut dire qu’après avoir tâté du fascisme, du nazisme et du stalinisme, le grand homme, en cette fin de conflit armé avec l’Allemagne, jouait sur du velours. Mais aujourd’hui, alors que ces tristes idéologies ont versé dans les poubelles de l’histoire, force est de constater, à voir les inquiétantes dérives de certains électorats de l’espace européen, que ce « pire système de gouvernement », comme le définissait en rigolant l’homme au cigare, commence à en énerver plus d’un… La faute à « pas de chance » diront certains, la faute surtout à certains élus que nous nous sommes donnés et que nous continuons à nous donner avec un aveuglement qui frise le masochisme. Je ne parle pas de ceux, nombreux, qui œuvrent au quotidien avec dévouement et générosité pour des clopinettes, à commencer par ces héroïques anonymes que l’on voit à l’œuvre dans ce Démocratie zéro6, mais des autres, ceux qui ont fait de la politique leur fond de commerce, une petite minorité surpuissante qui, devenue à force d’intrigues nabab de la République, vit parfois depuis des décennies dans des fromages devenus forteresses inexpugnables malgré l’incroyable médiocrité de son bilan. Démocratie zéro6 nous raconte à cet égard une histoire exemplaire, très révélatrice du fonctionnement pervers de nos institutions qui contribue à ruiner chaque jour un peu plus l’image que le citoyen se fait de la démocratie et de la république.

Au départ du film, une petite affaire locale qui aurait pu se régler par le simple bon sens, si des barons locaux de la Côte d’Azur, soucieux de monopoliser tous les pouvoirs, ne s’en étaient pas mêlés. Ilot entre montagne et Italie, la vallée de la Roya, au milieu des montagnes surplombant les Alpes Maritimes, rêve d’un bonheur tout simple : la gestion proche et adaptée de ses affaires due à une situation géographique particulière. Qu’on en juge : il faut, quand on part de cette vallée pour rejoindre les villes du littoral français, soit passer par un pays étranger (l’Italie) par une route assez souvent coupée par des éboulements, soit emprunter une route de montagne (un col à mille mètres, un autre à 800m) enneigée l’hiver, avec un temps de parcours supplémentaire de 50%. D’une situation si particulière, ses habitants, regroupés dans une demi douzaine de villages, avaient tiré la conclusion qu’il fallait se rassembler pour créer une petite communauté de communes de proximité. Une décision née d’une réelle expérience du quotidien.

Au premier coup d’œil on comprend le topo : aller ramasser un rocher sur la route, une poubelle renversée, donner un coup de chasse-neige… hop, c’est Antoine qui s’y colle, vite fait bien fait. Sauf que macache ! Veto du Préfet, bien chambré par Christian Estrosi et Eric Ciotti, potentats locaux qui ne peuvent tolérer que la moindre parcelle constructible du sol sacré de la Patrie échappe à leur pouvoir de délivrer des permis de construire ! Beaucoup plus chic, notre malheureuse vallée sera absorbée par la « Communauté d’Agglo de la Riviera française » (les cons !), un monstre de bureaucratie, et c’est Monsieur le Député Maire président de ceci et de cela qui ira ramasser la poubelle dans la montagne. Pas contents, les villageois sortent les fourches, en l’occurrence un référendum d’initiative locale pour contester cette adhésion forcée à la Côte d’Azur dorée sur tranche. Brave petit soldat, le préfet interdit la consultation et menace tout le monde de prison… C’est alors que le film commence…

France - 2013 - 1h15 - 866 Mo résolution DVD - Bonne Séance.