Chomsky-et-Cie.jpg

Film documentaire de Olivier Azam et Daniel Mermet

L’alchimie magique de Chomsky et Compagnie, c’est la rencontre d’un des plus grands intellectuels vivants et de ses compagnons de pensée avec un trublion du paysage radiophonique hexagonal. L’intellectuel, c’est Noam Chomsky, linguiste, mais aussi décrypteur permanent de l’histoire de son pays, dont il a démonté depuis la Guerre du Vietnam les ressorts idéologiques, les manipulations médiatiques dans le cadre de la propagande de guerre autant militaire qu’économique. L’homme de radio, c’est Daniel Mermet, dont l’émission Là bas si j’y suis sur France Inter constituait alors le dernier petit espace de bonheur et de simplicité dans une radio publique engluée par la pensée dominante. Une émission qui donnait la parole généralement aux sans voix, ceux qui intéressent peu ou pas les grands médias, ceux qui, syndicalistes, militants associatifs, luttent sans que les médias relaient leur luttes. Une émission qui s’est réfugiée depuis sur Internet… Daniel Mermet est allé à la rencontre d’un intellectuel mondialement connu, et il a demandé à un homme de l’image de le suivre dans sa rencontre : Olivier Azam, rescapé d’une télévision mythique, Zalea TV, qui fit vibrer de son impertinence le PAF avant de s’autosaborder pour signifier clairement l’impossibilité en France d’avoir une télé réellement libre (on se souvient de son Désentubages cathodiques).

Le cadre du film aurait pu se contenter du joli bureau bostonien de Noam Chomsky, encadré par le portrait du pacifiste Bertrand Russell et une statuette zapatiste, tant l’interview du monsieur s’avère passionnante. Mais le film a décidé de prendre la route, au sens américain, empruntant les motorways pour aller à la rencontre de ceux qui sont, sinon les disciples de Chomsky, du moins ses compagnons de pensée, et contribuent comme lui à déconstruire les mythes qui cimentent la cohésion apparente de notre beau monde capitaliste vérolé.

Entre deux passages par des stations service canadiennes, on y rencontre Max Wallace, qui a enquêté sur le mythe Henry Ford, et l’on découvre terrifié que le bon père de la voiture populaire et du concept paternaliste du patronat fut non seulement un antisémite avéré mais carrément une source d’inspiration pour Adolf Hitler, qui l’accueillit à Berlin en maître à penser. Sur un registre plus léger, l’écrivain Normand Baillargeon nous invite à découvrir la naissance du marketing politique avec les thèses d’Edward Bernays, qui travailla sur le retournement de l’opinion publique américaine pour l’engagement dans la Première Guerre Mondiale, mais convainquit également les femmes américaines que fumer était synonyme de liberté. La suite du voyage permet de rencontrer les déserteurs de la Guerre d’Irak aux côtés de ceux qui, plusieurs décennies auparavant, avaient fui la conscription pour la guerre du Vietnam ou Michael Albert et d’autres encore… Un véritable « cours d’autodéfense intellectuelle » pour reprendre le titre du best seller alter de Normand Baillargeon, qui est un véritable antidote définitif à la résignation autant intellectuelle que politique.

France 2008 - 1h52 - 1,66 Go résolution HD 720p (1280X720) - Les Mutins de Pangée.